C'était bon...
... aujourd'hui... de n'avoir plus d'horaires imposés, de rester couchée à lire sans qu'on vienne m'interrompre, de savourer le silence, de ne plus entendre les portes qui claquent, le personnel hospitalier qui se hèle avec des mégaphones dans la gorge, de pouvoir rester dans une pénombre fraîche sans qu'une andouille sûre d'elle vous balance "Mais il vous faut de la lumière ! C'est bon le soleil pour le moral !" et vlan ! que je te remonte d'autorité et d'un coup sec cette saleté de store et le flot d'indécence lumineuse crue qui te vrille la rétine, le cerveau et ce qu'il te reste de calme feint...
Elle sait pas qu'elle est passée à deux doigts du fait divers et de sa mort dans le gargouillis odieux de ce qui fut sa gorge mais n'est plus que la source du flot de sang qu'en a fait jaillir le scalpel que je lui ai mentalement planté dans la carotide. Grosse vache !
J'ai rien contre les grosses (ni contre les vaches) mais les sales connes qui vous la jouent institutrices revêches avec sermon à la con du genre "Mais faut manger voyons ! C'est pas joli d'être maigre comme ça !"... tout en louchant visiblement sur le 501 en taille 27/34 qu'elles sont à des années-lumière de pouvoir enfiler.... elle mériteraient des baffes !
Non ! Pauvre déchet sans cervelle ! Je ne suis PAS au régime (comme toi ou alors tu devrais, c'est clair). Je me force à manger au contraire. Ça passe pas, qu'est-ce que j'y peux ? Alors ne viens pas, fielleuse et envieuse à plus en pouvoir, me tartiner avec tes leçons de morale à deux centimes et ta psychologie de bazar (quoique j'ai d'excellentes raisons de penser que TOUTE psycho est de bazar comme TOUT psy est un charlatan assoiffé d'un pouvoir minimum sur les autres parce qu'il a lamentablement échoué à avoir quelque pouvoir que ce soit sur sa propre vie...) lue dans les pages santé de Marie-Claire...
Ce soir, je n'ai pas trop eu à me forcer, tout de même.... le Boursin Figue-Noix est définitivement une des plus belles choses qui soient au monde, tartiné sur une tranche de pain de seigle aux noix et aux raisins, délicatement grillée, arrosée d'un infime filet d'huile d'olive crétoise.... après la batavia toujours avec miettes de boursin Figue-Noix.
Je suis gavée pour trois jours, là...
Mais j'ai mangé quand j'ai voulu, sur mon plumard assise en tailleur et devant le PC, personne ne m'a forcée, surveillée, morigénée, tancée.
Personne n'a levé mes volets roulants en décrétant qu'on ne mange pas dans le noir.
Personne n'est entré sans frapper et sorti en claquant la porte.
Personne ne m'empêchera de boire du café au piment d'Espelette.
Personne ne m'empêchera de lire jusqu'à 6 heures du matin, avec de l'encens Lotus qui se consume doucement à la tête de mon lit. Ni de me doucher avant d'éteindre la lumière pour dormir ou sombrer.
Personne ne me réveillera avant midi ou 14 heures. Personne ne me réveillera tout court.
Je sais que ça va passer, cette sensation de bien-être qui n'est due qu'à la frustration d'avoir perdu une part de contrôle, une part de liberté pendant quelques temps.
Je sais que, très vite, ma liberté ne me charmera plus et ne masquera plus la béance du reste, de tout le reste.
Je vais juste en profiter encore quelques heures avant de rouvrir la porte aux vampires familiers.